Le secteur de la pharmacie en pleine évolution
L’année 2019 aura coïncidé avec de très importants changements concernant directement l’implantation et le fonctionnement des pharmacies en Polynésie ; des changements dont les effets devraient se renforcer dans les années à venir permettant « de faciliter l’approvisionnement en médicaments de la populations » et par là-même « d’offrir une meilleure offre de soin », mais aussi de proposer à cette dernière de meilleurs tarifs.
En juin 2019, l’Assemblée de la Polynésie française adoptait une loi du Pays modifiant les conditions de création des officines de pharmacie sur le Fenua, en abaissant notamment le seuil de création de ces officines à une population de 5 000 habitants au lieu de 7 000 précédemment.
Contestée devant le Conseil d’État, cette loi a été confirmée par ce dernier à la fin du mois d’octobre, ouvrant ainsi la voie à l’ouverture prochaine de quatre nouvelles pharmacies à Tahiti (dans les communes de Arue, Hitia’a o te Ra, Teva i Uta et Papara) ainsi que d’une cinquième sur l’île de Bora Bora, aux îles Sous-le-Vent.
Mais si la vocation de cette loi est bel et bien « de permettre d’améliorer l’accès aux produits pharmaceutiques en Polynésie française », comme l’a de nouveau spécifié le Conseil d’État en rendant sa décision, elle n’est pas la seule à avoir fait souffler un vent de renouveau sur ce secteur en 2019.
L’apparition d’un concept inédit importé directement de Métropole, « La santé pour tous » porté par le réseau Pharmacie Lafayette, concept novateur auquel sont désormais affiliées trois officines de Tahiti (Pharmacie du marché, Pharmacie Moana nui, Pharmacie Prince Hinoi), une de Raiatea (Pharmacie Avera) et une de Bora Bora (Pharmacie de Bora Bora), bouleverse depuis avril le milieu des pharmacies locales sur le plan de l’approvisionnement, mais surtout de la tarification.
Pour y voir plus clair à ce propos, et comprendre la nouveauté, il nous faut préalablement rappeler que, comme en Métropole, les prix des médicaments remboursables sont en Polynésie fixés à partir des dispositions prises par les régimes obligatoires d’assurance-maladie.
Impossible par conséquent pour les officines de jouer la carte de la concurrence et des offres tarifaires sur ces produits pharmaceutiques spécifiques.
Seuls les médicaments non remboursables, dont les prix sont fixés librement par les pharmaciens d’officine, sont en réalité susceptibles de faire l’objet d’une politique tarifaire différente et donc d’une véritable mise en concurrence.
Et c’est cette carte qu’a choisi de jouer depuis quelques années le groupe Lafayette, né d’une première officine ouverte à Toulouse en 1995, mais réellement constitué en tant que groupe (auquel adhèrent désormais plus de 200 pharmacies en France métropolitaine comme en outre-mer) depuis 2005.
Son levier : la modification de la répartition des différents secteurs sources du chiffre d’affaires des officines en faisant la part plus belle aux produits non remboursés, essentiellement compléments alimentaires, médicaments dédiés à l’automédication et produits relevant de la parapharmacie.
Hervé Jouves, président du groupe Lafayette, précise ainsi que « si une officine en Métropole affiche, en moyenne, un chiffre d’affaires d’1,7 million d’euros à l’année retiré prioritairement de 75 % de médicaments remboursables, le chiffre d’affaires des officines avec lesquelles ils ont signé des conventions atteint en moyenne 5 millions d’euros, issus pour un tiers des médicaments remboursables, pour un autre tiers des compléments alimentaires et médicaments dédiés à l’automédication et pour un dernier tiers de la parapharmacie ».
Ces chiffres et cette répartition différente leur permettent de bénéficier d’un pouvoir de négociation plus important auprès de leurs fournisseurs, plus nombreux par ailleurs, afin d’honorer leurs deux premiers crédos, à savoir « une politique de prix bas tous les jours » (hors médicaments remboursés donc) et « un plus large choix » de ces mêmes produits, avec en moyenne 22 000 références proposées contre 3 000 dans une officine classique ; cette différence étant cette fois générée par les très gros volumes négociés.
Enfin, on notera le troisième crédo de « La santé pour tous » : le renforcement de la compétence des équipes officinales à travers, notamment, la mise en œuvre d’une plate-forme d’e-learning vouée à l’amélioration de la qualité du conseil fourni au client. Ce renforcement prenant même la forme en Métropole d’un véritable accompagnement, à travers des services tels que la vaccination.
Via ces conventions d’assistance déjà signées avec cinq pharmacies polynésiennes, ce sont donc de nouvelles marques qui sont en train de faire leur apparition sur le Fenua (y compris les dix marques propres au groupe, élaborées avec une vraie démarche environnementale, allant vers du bio, du naturel et du préventif) en même temps qu’un impact certain attendu sur les tarifs de très nombreux produits.